By Le Figaro
Irak/attentat: Paris soigne des blessés
AFP 06/11/2010
Un avion va ramener en France dans les deux prochains jours une trentaine de blessés de l'attaque sanglante contre la cathédrale syriaque catholique de Bagdad, pour les faire soigner, a affirmé samedi le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner.
"Un avion français se rendra entre demain et lundi en Irak pour ramener en France une trentaine d'Irakiens blessés lors de la prise d'otages à l'église de Bagdad il y a quelques jours", a indiqué M. Kouchner à la presse après une rencontre avec le cardinal maronite Nasrallah Sfeir, chef de la plus puissante église au Liban. "Ils seront accueillis et soignés dans des hôpitaux en France", a précisé le ministre qui effectue une visite au Liban.
Le 31 octobre, 44 fidèles, en majorité des femmes et des enfants, et deux prêtres, ont été tués dans un attentat revendiqué par la branche irakienne du réseau Al-Qaïda, lors d'une messe dans la cathédrale située au coeur de Bagdad.
Le lendemain, le ministre français de l'Immigration Eric Besson avait indiqué que la France était prête à accueillir 150 personnes, en priorité des "personnes blessées dans l'attentat et leurs familles".
Le massacre risque de pousser un peu plus vers l'exil les membres de la communauté chrétienne, passée de 800.000 fidèles à 500.000 depuis l'invasion menée par les Etats-Unis en 2003. A Bagdad, cette communauté est passée de 450.000 à 150.000. Il ne reste que 14 paroisses chaldéennes dans la capitale contre 28 il y a sept ans.
L'appel au secours des chrétiens d'Irak
Par Jean-Marie Guénois, Fatma Kizikboga à Bagdad, 06/11/2010
L'onde de choc est terrible et l'appel au secours, poignant. Moins d'une semaine après l'attentat qui a visé la cathédrale syriaque catholique de Bagdad, les cinq archevêques d'Irak viennent d'adresser un message implorant la compassion de leurs «frères de France». Dimanche, ce texte sera lu dans toutes les paroisses du pays. Il n'y a pas une Église catholique du monde qui ne se mobilise, par la prière et la solidarité, pour venir en aide aux chrétiens irakiens, encore désignés après l'attentat, par al-Qaida, comme des «cibles légitimes».
Les cinq archevêques écrivent: «Notre calvaire est lourd et il nous paraît long. Le carnage qui a eu lieu à la cathédrale Notre-Dame du Perpétuel Secours de Bagdad, avec 58 morts, parmi lesquels deux jeunes prêtres et 67 blessés dont un prêtre, nous a profondément secoués. Nous perdons la patience, mais nous ne perdons pas la foi et l'espérance. Cet événement d'une telle ampleur qui se produit juste après la tenue du synode nous choque encore plus. Ce dont nous avons besoin c'est de votre prière et de votre soutien fraternel et moral. Votre amitié nous encourage à rester sur notre terre, à persévérer et à espérer. Sans cela nous nous sentons seuls et isolés. Nous avons besoin de votre compassion face à tout ce qui vient toucher la vie des innocents, chrétiens et musulmans. Restez avec nous, restez avec nous jusqu'à ce que soit passé le fléau. Que le Seigneur nous protège tous.».
Ces cinq-là - Athanase Matti Matoka, archevêque de Bagdad des Syriens, Louis Sako, archevêque de Kirkouk des Chaldéens, Emil Nona, archevêque de Mossoul des Chaldéens, Basile Georges Casmoussa, archevêque de Mossoul des Syriens, Bachar Warda, archevêque d'Erbil des Chaldéens - étaient, il y a encore quinze jours, à Rome pour participer au synode sur le Proche-Orient. Avec eux, Benoît XVI avait invité pour agir tous les évêques et experts religieux des dix pays de cette région du monde, de façon à endiguer le phénomène de diaspora des chrétiens vers l'Occident et à renouveler un dialogue avec les musulmans modérés, contre l'islam radical.
Le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, avait aussi été invité par le Pape à ce synode, conclu le dimanche 24 octobre après deux semaines de travaux.
Les cinq archevêques écrivent: «Notre calvaire est lourd et il nous paraît long. Le carnage qui a eu lieu à la cathédrale Notre-Dame du Perpétuel Secours de Bagdad, avec 58 morts, parmi lesquels deux jeunes prêtres et 67 blessés dont un prêtre, nous a profondément secoués. Nous perdons la patience, mais nous ne perdons pas la foi et l'espérance. Cet événement d'une telle ampleur qui se produit juste après la tenue du synode nous choque encore plus. Ce dont nous avons besoin c'est de votre prière et de votre soutien fraternel et moral. Votre amitié nous encourage à rester sur notre terre, à persévérer et à espérer. Sans cela nous nous sentons seuls et isolés. Nous avons besoin de votre compassion face à tout ce qui vient toucher la vie des innocents, chrétiens et musulmans. Restez avec nous, restez avec nous jusqu'à ce que soit passé le fléau. Que le Seigneur nous protège tous.».
Ces cinq-là - Athanase Matti Matoka, archevêque de Bagdad des Syriens, Louis Sako, archevêque de Kirkouk des Chaldéens, Emil Nona, archevêque de Mossoul des Chaldéens, Basile Georges Casmoussa, archevêque de Mossoul des Syriens, Bachar Warda, archevêque d'Erbil des Chaldéens - étaient, il y a encore quinze jours, à Rome pour participer au synode sur le Proche-Orient. Avec eux, Benoît XVI avait invité pour agir tous les évêques et experts religieux des dix pays de cette région du monde, de façon à endiguer le phénomène de diaspora des chrétiens vers l'Occident et à renouveler un dialogue avec les musulmans modérés, contre l'islam radical.
Le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, avait aussi été invité par le Pape à ce synode, conclu le dimanche 24 octobre après deux semaines de travaux.
Vendredi, à Lourdes, il a lu l'appel des évêques irakiens devant la centaine d'évêques français réunis en assemblée plénière, André Vingt-Trois n'a donc pas caché sa «grande émotion» en assurant, dans une réponse écrite, de la «prière» et du «soutien et l'amitié» des catholiques de France. Ils «ont été profondément choqués», assure le président des évêques. Ils appuient, dit-il encore, «votre désir légitime de demeurer sur votre terre où les chrétiens sont présents depuis les premiers siècles».
«Violence absurde»
En conclusion, l'archevêque de Paris a assuré : «Nous parlons de vous autour de nous et nous insistons pour que les instances internationales prennent la mesure de votre détresse et agissent avec fermeté.» Mais il a aussi souhaité «que l'Esprit de Dieu (…) fasse grandir dans le cœur de tous les hommes, de quelque religion qu'ils soient, le désir de la paix véritable et de la justice».
Dans sa cathédrale, Notre-Dame de Paris, une messe est organisée ce dimanche, à 18 h 30, par l'Œuvre d'Orient, à l'intention des victimes de cet attentat. À Rome, cette semaine, Benoît XVI s'est dit «profondément touché» par ces «attaques barbares». Le Pape a condamné «cette violence absurde, d'autant plus féroce qu'elle a touché des personnes sans défense, rassemblées dans la maison de Dieu, qui est une maison d'amour et de réconciliation».
Survivant du massacre de la Toussaint, Talal veut prendre le chemin de l'exil
Talal Tomas se qualifie de miraculé. Il fait partie de la poignée de personnes sorties indemnes de la prise d'otages survenue dimanche dernier, à la veille de la Toussaint dans l'église Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours à Bagdad. L'attentat, qui reste le plus violent commis contre la communauté chrétienne en Irak depuis l'invasion américaine en 2003, et revendiqué le lendemain par «l'État islamique en Irak», un mouvement affilié à al-Qaida, s'est soldé par la mort de 52 personnes dont deux prêtres et 67 blessés.
«J'ai perdu sous mes yeux deux cousines et mon meilleur ami», confie cet homme de 27 ans au regard noir de cernes qui semblent lui donner le double de son âge. Trois jours avant, lui et ses deux sœurs ont dû quitter leur appartement situé dans le quartier de Karrada dans le centre de la capitale irakienne pour s'installer dans un bidonville d'Ademiyah. « Nous étions sans cesse menacés par l'Armée du Mahdi (milice extrémiste chiite dirigée par l'imam radical Moqtada al-Sadr, actuellement réfugié en Iran, NDLR), la pression communautaire est devenue insoutenable, mais je ne peux pas dire me sentir en sécurité ici pour autant», explique-t-il, le sourire inquiet.
Difficile pour Talal de trouver une explication au basculement de l'Irak dans les violences interreligieuses. Seule certitude aujourd'hui, une certaine nostalgie pour le régime de Saddam Hussein, le président irakien condamné à mort pour crime contre l'humanité, et exécuté par pendaison en 2006. «Certes Saddam était un tyran, mais personne n'osait s'en prendre à nous à cette époque. Désormais la situation va de pire en pire ; je pense que les chrétiens n'ont plus aucune chance de vivre dans ce pays », résume-t-il, désespéré. Contrainte à l'exode depuis le début de la guerre en 2003, la communauté chrétienne en Irak est passée de 800.000 à 500.000 personnes.
En contact avec des passeurs
Aujourd'hui, comme Talal, ils sont des centaines à vouloir plier bagages. «Je suis prêt à partir à tout moment. Peu importe l'endroit, pourvu que je ne me sente pas persécuté en raison de mes croyances religieuses. » Plus tard, il avouera être en contact avec des passeurs qui l'aideront, lui et sa famille, à traverser les frontières clandestinement vers l'Europe à raison de 15.000 dollars par personnes.
Comme pour clarifier ses opinions, cet homme tient néanmoins à préciser n'éprouver aucun ressentiment pour les Irakiens. «Le problème ne vient pas d'une incapacité de cohabitation entre les différentes communautés religieuses, mais de règlements de comptes purement politiques », résume Talal. Mardi, le Parlement irakien se réunira pour la seconde fois depuis les élections législatives. Un espoir pour les Irakiens de voir leur pays sortir de l'instabilité et de l'impasse politique qui dure depuis plus de huit mois. «Je ferai une croix définitive sur l'Irak si Nouri al-Maliki redevient premier ministre, prévient Talal. Autant aller vivre en Iran, qui resterait le véritable maître du jeu en Irak.»
«Violence absurde»
En conclusion, l'archevêque de Paris a assuré : «Nous parlons de vous autour de nous et nous insistons pour que les instances internationales prennent la mesure de votre détresse et agissent avec fermeté.» Mais il a aussi souhaité «que l'Esprit de Dieu (…) fasse grandir dans le cœur de tous les hommes, de quelque religion qu'ils soient, le désir de la paix véritable et de la justice».
Dans sa cathédrale, Notre-Dame de Paris, une messe est organisée ce dimanche, à 18 h 30, par l'Œuvre d'Orient, à l'intention des victimes de cet attentat. À Rome, cette semaine, Benoît XVI s'est dit «profondément touché» par ces «attaques barbares». Le Pape a condamné «cette violence absurde, d'autant plus féroce qu'elle a touché des personnes sans défense, rassemblées dans la maison de Dieu, qui est une maison d'amour et de réconciliation».
Survivant du massacre de la Toussaint, Talal veut prendre le chemin de l'exil
Talal Tomas se qualifie de miraculé. Il fait partie de la poignée de personnes sorties indemnes de la prise d'otages survenue dimanche dernier, à la veille de la Toussaint dans l'église Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours à Bagdad. L'attentat, qui reste le plus violent commis contre la communauté chrétienne en Irak depuis l'invasion américaine en 2003, et revendiqué le lendemain par «l'État islamique en Irak», un mouvement affilié à al-Qaida, s'est soldé par la mort de 52 personnes dont deux prêtres et 67 blessés.
«J'ai perdu sous mes yeux deux cousines et mon meilleur ami», confie cet homme de 27 ans au regard noir de cernes qui semblent lui donner le double de son âge. Trois jours avant, lui et ses deux sœurs ont dû quitter leur appartement situé dans le quartier de Karrada dans le centre de la capitale irakienne pour s'installer dans un bidonville d'Ademiyah. « Nous étions sans cesse menacés par l'Armée du Mahdi (milice extrémiste chiite dirigée par l'imam radical Moqtada al-Sadr, actuellement réfugié en Iran, NDLR), la pression communautaire est devenue insoutenable, mais je ne peux pas dire me sentir en sécurité ici pour autant», explique-t-il, le sourire inquiet.
Difficile pour Talal de trouver une explication au basculement de l'Irak dans les violences interreligieuses. Seule certitude aujourd'hui, une certaine nostalgie pour le régime de Saddam Hussein, le président irakien condamné à mort pour crime contre l'humanité, et exécuté par pendaison en 2006. «Certes Saddam était un tyran, mais personne n'osait s'en prendre à nous à cette époque. Désormais la situation va de pire en pire ; je pense que les chrétiens n'ont plus aucune chance de vivre dans ce pays », résume-t-il, désespéré. Contrainte à l'exode depuis le début de la guerre en 2003, la communauté chrétienne en Irak est passée de 800.000 à 500.000 personnes.
En contact avec des passeurs
Aujourd'hui, comme Talal, ils sont des centaines à vouloir plier bagages. «Je suis prêt à partir à tout moment. Peu importe l'endroit, pourvu que je ne me sente pas persécuté en raison de mes croyances religieuses. » Plus tard, il avouera être en contact avec des passeurs qui l'aideront, lui et sa famille, à traverser les frontières clandestinement vers l'Europe à raison de 15.000 dollars par personnes.
Comme pour clarifier ses opinions, cet homme tient néanmoins à préciser n'éprouver aucun ressentiment pour les Irakiens. «Le problème ne vient pas d'une incapacité de cohabitation entre les différentes communautés religieuses, mais de règlements de comptes purement politiques », résume Talal. Mardi, le Parlement irakien se réunira pour la seconde fois depuis les élections législatives. Un espoir pour les Irakiens de voir leur pays sortir de l'instabilité et de l'impasse politique qui dure depuis plus de huit mois. «Je ferai une croix définitive sur l'Irak si Nouri al-Maliki redevient premier ministre, prévient Talal. Autant aller vivre en Iran, qui resterait le véritable maître du jeu en Irak.»
ONU: la France veut un débat sur l'Irak
AFP 4/11/2010
AFP 4/11/2010
Bernard Kouchner a annoncé qu'il allait demander un débat au Conseil de sécurité de l'ONU sur la violence en Irak et a écrit au patriarche des Chaldéens pour l'assurer de la solidarité de la France avec les chrétiens d'Irak. "Nous allons proposer un débat au conseil de sécurité sur la situation en Irak", a dit le ministre des QAffaires étrangères devant le Sénat.
La branche irakienne d'Al-Qaïda a revendiqué le massacre de la cathédrale syriaque catholique de Bagdad, où ont péri 44 fidèles et deux prêtres dimanche. Elle a affirmé que les chrétiens étaient désormais des "cibles légitimes" de ses commandos. Concernant le sort spécifique des chrétiens d'Irak, M. Kouchner a précisé qu'il avait "demandé que ce sujet soit abordé au plus vite par les 27 de l'Union européenne".
M. Kouchner a annoncé avoir reçu dans la matinée les représentants des communautés chrétiennes d'Orient. "Ils nous demandent de prendre en charge une vingtaine de blessés graves", a-t-il dit. "Nous sommes en train de le faire, ils seront traités dans les hôpitaux parisiens", a-t-il promis. Dans une lettre adressée au cardinal Emmanuel III Delly, patriarche des Chaldéens, dont le texte est parvenu à l'AFP, Bernard Kouchner affirme que "la France sera toujours aux côtés des chrétiens d'Irak" et "ne se dérobera pas".