By Paris Match, 21/04/2011
«Au Kurdistan, nous pouvons vivre en paix». Cette phrase, je l’entends depuis le début de mon reportage. Non seulement le Kurdistan offre aux chrétiens la sécurité qui manque cruellement dans le reste de l’Irak, mais en plus, il met en place une politique d’accueil très généreuse. Une générosité étonnante, tant les relations entre Kurdes et chrétiens ont été tumultueuses par le passé. Quels sont donc les intérêts politiques et stratégiques de cet accueil généreux ?
Kurdes et Chrétiens, des relations tumultueuses…
«Nous avons toujours vécu dans la région du Kurdistan» affirme le père Comani. Il est vrai que les chrétiens du Kurdistan font partie des plus anciens habitants de la région. Pendant la conquête musulmane, ils ne se sont pas convertis, c’est pourquoi, encore aujourd’hui, les chrétiens du Kurdistan parlent l’araméen, la langue de Jésus. Depuis 2000 ans, chrétiens et Kurdes entretiennent de plus ou moins bonnes relations; mais c’est en 1960, pendant la guerre opposant Bagdad aux Kurdes que la première vague d’exode commence. «Beaucoup de chrétiens ont quitté le Kurdistan, car ils ne voulaient pas s’allier aux Kurdes. Quand nos familles ne voulaient pas combattre avec eux, elles étaient tuées» continue le père Comani.
Beaucoup rejoignent donc les grandes villes comme Bagdad ou Mossoul. Les bombardements successifs de l’armée de Saddam Hussein en 1975 et en 1988 (Anfal) ont accentué cet exode. Enfin, dans les années 1990, la guerre civile au Kurdistan pousse une fois de plus les chrétiens à quitter la région. Ces différents événements ont peu à peu vidé le Kurdistan irakien de ses chrétiens. Mais la chute de Saddam Hussein et l’arrivée des islamistes intégristes en Irak ont brutalement inversé le sens de l’exode. Au nombre de 30 000 en 2003 au Kurdistan, les chrétiens dépasseraient aujourd’hui les 100 000.
Kurdes et Chrétiens, des relations tumultueuses…
«Nous avons toujours vécu dans la région du Kurdistan» affirme le père Comani. Il est vrai que les chrétiens du Kurdistan font partie des plus anciens habitants de la région. Pendant la conquête musulmane, ils ne se sont pas convertis, c’est pourquoi, encore aujourd’hui, les chrétiens du Kurdistan parlent l’araméen, la langue de Jésus. Depuis 2000 ans, chrétiens et Kurdes entretiennent de plus ou moins bonnes relations; mais c’est en 1960, pendant la guerre opposant Bagdad aux Kurdes que la première vague d’exode commence. «Beaucoup de chrétiens ont quitté le Kurdistan, car ils ne voulaient pas s’allier aux Kurdes. Quand nos familles ne voulaient pas combattre avec eux, elles étaient tuées» continue le père Comani.
Beaucoup rejoignent donc les grandes villes comme Bagdad ou Mossoul. Les bombardements successifs de l’armée de Saddam Hussein en 1975 et en 1988 (Anfal) ont accentué cet exode. Enfin, dans les années 1990, la guerre civile au Kurdistan pousse une fois de plus les chrétiens à quitter la région. Ces différents événements ont peu à peu vidé le Kurdistan irakien de ses chrétiens. Mais la chute de Saddam Hussein et l’arrivée des islamistes intégristes en Irak ont brutalement inversé le sens de l’exode. Au nombre de 30 000 en 2003 au Kurdistan, les chrétiens dépasseraient aujourd’hui les 100 000.
«Cet accueil, c’est de la communication!»
Depuis 2003 et le début de la persécution des chrétiens d’Irak, le gouvernement de la région autonome du Kurdistan ouvre largement ses portes aux chrétiens. Non seulement, il les accueille, mais les accompagne généreusement dès leur arrivée: aide financière, construction de maisons, donations de terrains… Une générosité quisemble parfois excessive comparée à leurs relations passées tumultueuses «Tout ça, ce n’est que de la politique, de la communication!» s’exclame Loay, très investi dans le Conseil populaire des Chaldéens, Syriaques et Assyriens, un conseil qui s’est donnée la difficile mission de faire parler ces différents courants chrétiens d’une seule et même voix. «En accueillant les chrétiens, ils veulent montrer à l’Occident que leur région va bien et qu’elle est sécurisée» continue-t-il. Le président de ce même conseil, M. Azziz rappelle par ailleurs que «L’Irak est un état fédéral, et que, par conséquent, chaque Irakien est libre de se déplacer où il le souhaite. Pourquoi dire que “le Kurdistan les accueille”, alors que de toutes façons, il ne pourrait pas les refuser?»
D’autres pensent que le Kurdistan souhaite accueillir les chrétiens pour compter plus d’habitants et avoir plus de poids au parlement de Bagdad. Les rumeurs les plus folles accusent même les Kurdes de financer les attentats de Bagdad ou Mossoul contre les chrétiens pour les pousser à rejoindre le Kurdistan. Enfin, les chrétiens sont pour le Kurdistan les réfugiés idéaux: ils ne représentent pas de menace politique réelle pour le gouvernement actuel, ils sont eux aussi hostiles à la propagande islamiste et ils sont bien souvent qualifiés: beaucoup d’entre eux sont médecins, ingénieurs, techniciens ou commerçants.
L’avenir incertain deschrétiens au Kurdistan
Les chrétiens sont donc dans l’ensemble bien accueillis mais la pérennité de ces bonnes relations semble toutefois incertaine. En effet, de nombreuses communautés ne bénéficient pas aussi largement des aides du gouvernement et certains prêtres redoutent que ces avantages rendent jaloux d’autres Kurdes. De plus, les Américains qui ont fortement soutenu l’indépendance du Kurdistan et continuent à les protéger sont sensés quitter définitivement le territoire irakien en juillet prochain.
L’autonomie et la stabilité du Kurdistan sera alors réellement mise à l’épreuve, et rien n’exclut un nouveau conflit dans la région après le retrait des troupes. LesTurcs représentent également une menace pour le Kurdistan. Ils sont en effet toujours en conflit avec le PKK, un parti kurde révolutionnaire caché dans les montagnes. La présence de bases militaires turques sur le sol kurde, le canon pointé vers les montagnes rappelle en permanence cette menace. Enfin, si l’on écoute certains chrétiens réfugiés au Kurdistan, l’extrémisme islamiste dont est pour l’instant épargné le Kurdistan ne tardera pas à s’y développer. Et de nouveau, les chrétiens deviendront la première cible.
Les intérêts du gouvernement kurde mêlés aux incertitudes à venir poussent certains chrétiens à prendre eux même leur avenir en main. C’est le cas de certains partis politiques chrétiens ou conseils populaires aux propositions et projets plus ou moins ambitieux. Parmi eux, celui de créer une région autonome au sein de l’Irak, une région réservée aux chrétiens. Une idée qui ne fait pas l’unanimité.
Depuis 2003 et le début de la persécution des chrétiens d’Irak, le gouvernement de la région autonome du Kurdistan ouvre largement ses portes aux chrétiens. Non seulement, il les accueille, mais les accompagne généreusement dès leur arrivée: aide financière, construction de maisons, donations de terrains… Une générosité quisemble parfois excessive comparée à leurs relations passées tumultueuses «Tout ça, ce n’est que de la politique, de la communication!» s’exclame Loay, très investi dans le Conseil populaire des Chaldéens, Syriaques et Assyriens, un conseil qui s’est donnée la difficile mission de faire parler ces différents courants chrétiens d’une seule et même voix. «En accueillant les chrétiens, ils veulent montrer à l’Occident que leur région va bien et qu’elle est sécurisée» continue-t-il. Le président de ce même conseil, M. Azziz rappelle par ailleurs que «L’Irak est un état fédéral, et que, par conséquent, chaque Irakien est libre de se déplacer où il le souhaite. Pourquoi dire que “le Kurdistan les accueille”, alors que de toutes façons, il ne pourrait pas les refuser?»
D’autres pensent que le Kurdistan souhaite accueillir les chrétiens pour compter plus d’habitants et avoir plus de poids au parlement de Bagdad. Les rumeurs les plus folles accusent même les Kurdes de financer les attentats de Bagdad ou Mossoul contre les chrétiens pour les pousser à rejoindre le Kurdistan. Enfin, les chrétiens sont pour le Kurdistan les réfugiés idéaux: ils ne représentent pas de menace politique réelle pour le gouvernement actuel, ils sont eux aussi hostiles à la propagande islamiste et ils sont bien souvent qualifiés: beaucoup d’entre eux sont médecins, ingénieurs, techniciens ou commerçants.
L’avenir incertain deschrétiens au Kurdistan
Les chrétiens sont donc dans l’ensemble bien accueillis mais la pérennité de ces bonnes relations semble toutefois incertaine. En effet, de nombreuses communautés ne bénéficient pas aussi largement des aides du gouvernement et certains prêtres redoutent que ces avantages rendent jaloux d’autres Kurdes. De plus, les Américains qui ont fortement soutenu l’indépendance du Kurdistan et continuent à les protéger sont sensés quitter définitivement le territoire irakien en juillet prochain.
L’autonomie et la stabilité du Kurdistan sera alors réellement mise à l’épreuve, et rien n’exclut un nouveau conflit dans la région après le retrait des troupes. LesTurcs représentent également une menace pour le Kurdistan. Ils sont en effet toujours en conflit avec le PKK, un parti kurde révolutionnaire caché dans les montagnes. La présence de bases militaires turques sur le sol kurde, le canon pointé vers les montagnes rappelle en permanence cette menace. Enfin, si l’on écoute certains chrétiens réfugiés au Kurdistan, l’extrémisme islamiste dont est pour l’instant épargné le Kurdistan ne tardera pas à s’y développer. Et de nouveau, les chrétiens deviendront la première cible.
Les intérêts du gouvernement kurde mêlés aux incertitudes à venir poussent certains chrétiens à prendre eux même leur avenir en main. C’est le cas de certains partis politiques chrétiens ou conseils populaires aux propositions et projets plus ou moins ambitieux. Parmi eux, celui de créer une région autonome au sein de l’Irak, une région réservée aux chrétiens. Une idée qui ne fait pas l’unanimité.