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23 marzo 2017

Une PME de la Drôme fabrique des « maisons en kit » pour les chrétiens d’Irak

Malo Tresca

Depuis plusieurs mois, l’entreprise drômoise Logelis exporte, à la demande de l’Œuvre d’Orient, des maisons transportables pour les chrétiens réfugiés au Kurdistan irakien. Une solution de relogement inédite, qui pourrait, à terme, gagner à son tour Mossoul. Depuis plusieurs mois, d’intrigants blocs préfabriqués trônent dans le quartier chrétien d’Ainkawa, dans la périphérie d’Erbil, au cœur du Kurdistan irakien. Agencées les unes à côté des autres, ces structures – qui forment en tout 40 appartements et 29 maisons individuelles – dessinent les contours du premier « village pilote » exporté, à la demande de l’Œuvre d’Orient, par l’entreprise française Logelis.
Spécialisée dans le logement social et la construction de maisons à bas coût, cette PME installée à Romans-sur-Isère, dans la Drôme, a achevé en janvier la construction d’un premier complexe d’habitations modulables pour les familles chrétiennes chassées par Daech, dans une région qui a vu affluer, en moins de deux ans, près de 1,5 million de réfugiés. Cette solution d’hébergement inédite, – qui nécessite environ trois mois de chantier des fondations aux finitions –, pourrait, à terme, se multiplier dans plusieurs autres villes sinistrées du pays.

Un « bras armé » pour la reconstruction
« Quand nous avons été sollicités par l’Œuvre d’Orient pour intervenir en Irak, nous avons eu la conviction que ce projet avait un sens profond pour notre entreprise », explique Renaud Sassi, le fondateur et actuel président de Logelis. « Nous avons compris que nouspouvions être un “bras armé” de construction et de reconstruction dans le pays, et un vecteur d’espérance », poursuit-il. En février 2016, un premier voyage d’étude en Irak, organisé par l’Œuvre d’Orient, confirmera cette intuition.
Lors de son séjour dans le pays, Renaud Sassi constate en effet que les techniques de production et de montage de ses panneaux correspondent aux attentes locales. « Notre concept nous permet d’avoir des habitations très bien isolées, écologiques, dans un pays où l’amplitude thermique peut varier de – 10 °C à 50 °C », précise le gérant de l’entreprise drômoise.
D’une surface de 35, 40 ou 65 mètres carrés, – et pour un coût moyen de production, relativement faible, d’environ 350 € du mètre carré –, « elles sont très faciles et rapides à monter », témoigne Munthir Jaboory, un ingénieur mécanique irakien, aujourd’hui l’un des principaux relais irakiens de Logelis dans le pays.

L’implication des réfugiés dans le projet

« L’entreprise a eu une approche originale dans le pays », note, de son côté, Vincent Gelot, responsable des projets de L’Œuvre d’Orient en Irak, en Syrie et au Liban. « Plutôt que d’imposer une vision architecturale, elle a sondé les réfugiés irakiens pour mieux connaître leurs attentes, et proposer des schémas de maisons correspondant aux besoins des futurs utilisateurs ». Dans les camps de réfugiés, l’initiative a du succès. Les femmes, particulièrement, se mobilisent pour répondre.
Inauguré le 22 janvier par Mgr Pascal Gollnisch, le directeur de l’Œuvre d’Orient, et en présence des archevêques syriaque catholique et chaldéen, et du consul de France, le complexe attend désormais l’arrivée de ses premiers propriétaires. « Les procédures d’affectation aux familles sont lancées, et devraient s’achever, au plus tard, d’ici une quinzaine de jours », témoigne l’un des responsables du chantier, qui travaille sur place, à Ainkawa. 

De nombreux autres projets Outre ce village pilote, Logelis a développé, dans la région, un certain nombre d’autres projets d’infrastructures. Une église modulable a ainsi vu le jour, en juillet 2016, dans le quartier chrétien d’Ainkawa. « Nous avons eu alors une petite semaine de retard sur l’achèvement des travaux », sourit encore ce responsable de chantier, « parce que les réfugiés ne cessaient d’y organiser des messes, ce qui nous empêchait de terminer les finitions ! ».
Et le partenariat noué entre Logelis et l’Œuvre d’Orient prévoit même d’aller plus loin. Un centre pour personnes handicapées devrait voir le jour à Dohuk, dans le nord du pays, dans le courant de l’année 2017. « Nous avons aussi des projets de construction d’écoles, au Kurdistan irakien », renchérit Renaud Sassi. D’autres maisons récemment livrées seront assemblées à Karamlech, pour y loger les démineurs chargés de nettoyer les explosifs laissés par Daech.
Naissance d’une société irakienne De ce projet est même née une société irakienne. Entièrement dépendante de Logelis, la « Quick Wall Company » recrute, dans les camps, des réfugiés kurdes. « Plutôt que de faire construire nos fenêtres ou nos portes en Turquie ou en Chine, nous embauchons des ouvriers locaux, pour que ces derniers aient une perspective professionnelle », ajoute son président.
« Nous étions ainsi en moyenne, jusqu’ici, une quarantaine de travailleurs », souligne Munthir Jaboory. À terme, Logelis espère même créer une coopérative ouvrière pour produire, directement en Irak, ses panneaux composites. Une démarche qui créerait de l’emploi, en limitant les coûts et les délais de transport des matériaux.